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LA FIEVRE DU QI GONG : LE RETOUR partie 3

Dans les deux derniers articles concernant le Qi Gong de Santé, nous avons vu ce que nous réserve la Chine via son Association Chinoise de Qi Gong de Santé et la fédération internationale de Qi Gong.

Elle a créé le Qi Gong de Santé qu’elle utilise à plusieurs titres :

  • Pour la préservation de la santé et la prévention des maladies
  • Pour contrôler la pratique du Qi gong et empêcher les dérives de la fin du siècle dernier
  • Pour organiser des manifestations internationales

Le Qi Gong de Santé s’inscrit dans un ensemble de plans politiques à portée internationale  (Plan Santé Chine 2030, « nouvelle route de la soie »…).

Ce qui permettra à la Chine d’asseoir sa notoriété internationale et de peser dans l’échiquier mondial.

Tout ça est bien joli mais quels seraient les bénéfices et les inconvénients de cette politique dans les domaines qui nous concerne ici : le Qi Gong et la Médecine Chinoise?

Les bénéfices

Outre l’augmentation du bien-être et la prévention des maladies de toute l’humanité, on peut espérer plusieurs axes d’améliorations dans différents domaines.

Le Qi Gong dans l’enseignement supérieur

Pour avoir une idée de la place du Qi Gong dans l’enseignement Universitaire, j’avais choisi de prendre le cas  de la plus grande Université de Médecine Chinoise de Chine et donc du monde, celle de Beijing (Pékin).

Mais maintenant avec du recul, je m’aperçois que j’ai fait une bourde, c’est la Fac de Sport de Beijing que j’aurais dû choisir !

Mais bon, ce sera pour la prochaine fois  🙂 .

Revenons à notre fac de Médecine Chinoise de Beijing.

Elle a été fondée en 1956, c’est l’une des premières écoles supérieures de médecine chinoise à avoir vu le jour en République Populaire de Chine.

  • elle est affiliée au ministère de l’éducation.
  • elle a été fondée par le ministère de l’éducation, le ministère de la santé et le bureau administratif de la médecine traditionnelle chinoise.
  • elle est sur trois campus situés dans trois districts (le He Ping, le Wang Jing et le Liang Xiang).

L’université comporte 15 départements de :

  • médecine fondamentale,
  • pharmacopée,
  • acupuncture,
  • gestion,
  • infirmier,
  • sciences humaines,
  • trois départements de médecine clinique,
  • un département international,
  • formation continue,
  • éducation à distance,
  • des classiques chinois,
  • médecine chinoise pour taïwanais, hongkongais et macanais
  • étude de troisième cycle.

Elle propose 11 licences dont l’acupuncture, le tui na et la pharmacopée, 45 spécialités de master et 41 spécialités de doctorat.

L’établissement enseigne aussi à travers ses 36 hôpitaux qui prennent en charge les apprentis et les stagiaires.

Elle a été la première institution chinoise à avoir accepté des étudiants étrangers.

Elle a formé plus de 30000 professionnels de médecine traditionnelle chinoise venant de 90 pays.

Cette Université est donc largement représentative de la formation des médecins de Médecine Chinoise.

Si on prend le contenu du troisième cycle des étudiants en Médecine Chinoise, on a :

Dans ce tableau récapitulatif, nous pouvons voir que le Qi Gong :

  •  n’est qu’un “cours optionnel
  • à le plus petit nombre d’heures de cours « 18 heures»
  • ainsi que le plus petit coefficient « 1».

18 heures c’est assez cours pour prétendre maîtriser le Qi Gong.

Les cours sont assurés par Liu Tianjun  刘天君.

Liu Tianjun

Né en 1949, professeur, médecin-chef, spécialisé en Qi Gong médical, il est vice-président exécutif de la « National Education Research Qi Gong ».

Il est le seul à encadrer le doctorat « d’acupuncture-moxibustion et Qi Gong » depuis des années. Il ne peut même pas prendre sa retraite !

Les 18 heures sont très théoriques, on y apprend :

  • l’histoire du Qi Gong
  • les trois harmonisations (Cœur, Qi et Corps)
  • la théorie de différents Qi Gong

La seule pratique faite en cours est la méditation. C’est ce que m’ont confirmé sur place ses étudiants.

Je n’ai pas pu rencontrer Liu Tianjun, pour l’intercepter dans un créneau de 18 heures sur toute une année c’est assez compliqué même pour un Pékinois   😉

Le livre de référence pour ce cours est justement celui du Professeur Liu Tianjun :

新世纪全国高等中医药院校规划教材:中医气功学(第2版) 

Liu Tianjun  a consacré sa carrière à promouvoir le Qi Gong dans la Médecine Chinoise.

En 1999, il a été sollicité en tant qu’expert de Qi Gong dans « l’affaire du Falun Gong ». Il y avait donné une orientation scientifique au Qi Gong tout en l’incluant dans le développement de la Médecine Chinoise. Malgré cela, le développement du Qi Gong dans la Médecine Chinoise est resté en difficulté.

Il a récemment déclaré :

«Le Qi Gong devrait devenir un cours obligatoire pour les étudiants des facultés de médecine et des universités chinoises».

Grâce aux ambitions de l’Association Chinoise de Qi Gong de Santé et de la fédération internationale de Qi Gong, tous les freins depuis 1999 pourraient être desserrés et Liu Tianjun pourra enfin prendre sa retraite.

Les centres de recherche spécialisés en Qi Gong

Il existe au moins trois établissements, sous dépendance du Ministère de la Santé, qui effectuent des recherches sur les applications médicales du Qi Gong :

  • le centre national de Qi Gong de Beidaihe
  • l’association nationale de recherche sur le Qi Gong de Shanghai
  • l’association nationale de Qi Gong médical de pékin
Centre national de qi gong de Beidaihe

Cette partie sera détaillée dans d’autres articles. Surtout sur l’origine de la pratique des enseignants qui ne sont pas forcément passés par la case « université ».

On peut espérer que ces établissements auront beaucoup plus de moyen pour développer la Recherche, là encore on ne peut que se réjouir de cette nouvelle politique de la Chine.

 

La formation des médecins en Qi Gong Médical

Revenons dans la capitale.

L’Université gère la clinique de Médecine Chinoise qui est « collée » à elle.

On m’avait souvent dit qu’il y avait deux médecins qui pratiquaient le Qi Gong Médical dans cette clinique.

Le premier est censé être meilleurs dans son domaine, en tout cas il facture sa séance plus de six fois plus cher (200 yuans contre 30 pour le second).

Je me suis rendu une première fois à la clinique, seul le second médecin était disponible ce jour-là.

Je voulais voir comment travaillait un médecin en « Qi Gong » dans un hôpital de Médecine Chinoise « généraliste », par opposition avec un établissement spécialisé en Qi Gong.

Pour la petite anecdote, j’ai passé une bonne partie de la journée en salle d’attente.

Les noms des patients (ou usagers 😉 ) sont affichés en chinois sur plusieurs écrans, comme j’étais le seul occidental, mon nom était en français, tout le monde savait qui j’étais ! Ce n’était pas très fair-play, je ne pouvais savoir qui était qui 🙂 .

Pendant ce temps, je me demandai comment j’allais poser mes questions à ce médecin avec mon chinois de « survie ».

Mon tour arrive, je rentre dans une pièce, l’ambiance était détendue, un patient se faisait masser en Tui Na par un étudiant.

Le patient échange quelques mots avec moi en anglais, puis il switch dans un français à rendre jaloux n’importe quel francophone. Il m’explique qu’il n’a jamais mis les pieds en France et qu’il a appris à l’institut des langues étrangères de Pékin !

C’est quand même fou de tomber  sur un chinois francophone, dans le même créneau de visite, et tout ça dans une clinique où de toute la journée j’étais le seul étranger !

Il fallait que je trouve quelque chose qui n’allait pas dans mon corps.

Sachant que les jours précédents, toujours par curiosité, j’ai vu en tant que patient :

  • un médecin taoïste
  • un chaman
  • un médecin bouddhiste
  • j’ai fait un soin en Bian Shi, une sorte de Gua Sha en mieux.

Je remercie au passage, mon ami Lokmane Benaïcha qui m’a permis de faire ces belles rencontres 😀.

Malgré leur façon de travailler différente, ils avaient tous le même diagnostic, je me portais bien avec quelques petits désagréments au niveau de la vésicule biliaire, des trucs d’occidentaux quoi 😉!

Ouf, j’étais rassuré !

Je me suis « auto-scanné » et j’avais deux vertèbres qui n’étaient pas d’accord entre elles, et non ce n’est pas que du domaine du Tui Na ou de l’acu 🙂.

Au final, le médecin a fait un très bon soin à 90% en Tui Na et « Zheng Gu Tui Na » et moins de 10% en Qi Gong et encore c’était assez subtil.

Il a été super sympa contrairement à son confrère, le gars plus expérimenté, mais ça c’est une autre histoire 🙂.

On ne peut pas résumer la pratique du Qi Gong Médical en milieu hospitaliers en Chine juste avec ce petit exemple. C’est un fonctionnaire de l’état dans une structure hospitalière. On avait vu que depuis 1999, le périmètre du Qi Gong à l’hôpital a été drastiquement réduit, que ce soit dans la logistique que dans la pratique des médecins. On leur a donné des consignes pour ne pas « utiliser » leur art à leur potentiel maximum.

Le fait que je ne sois pas chinois n’a rien changé à sa façon de traiter un patient.

En Chine, les personnes qui souhaitent faire un soin en Qi Gong, ont trois possibilités, elles peuvent aller voir les praticiens:

  • dans les hôpitaux ou cliniques de Médecine Chinoise, mais les médecins formés sont peu nombreux, on a vu pourquoi.
  • dans les centres et les cliniques dédiés au Qi Gong.
  • et pour finir ceux que certains chinois appellent Qì Gōng Wài Qì Liáo Fǎ Yīzhě  气功外气疗法医者 : Guérisseur en soin externe en Qi Gong.

Les chinois que j’ai interrogé et qui ont reçu ce genre de soin, évoquaient des guérisseurs et non des médecins. Ils sont perçus un peu comme les magnétiseurs et les rebouteux en occident.

Même dans le discours « officiel » des médecins chinois, le Qi Gong Médical semble être « hors de leur périmètre ». La propagande anti-Qi Gong de 1999 a marqué les esprits pour longtemps.

Dans nos exemples, je fais plus allusion aux soins appliqués à un patient qu’à la prescription d’exercices de Qi gong. Cette seconde partie est beaucoup mieux acceptée.

J’ai deux exemples qui vont dans ce sens, même s’ils commencent à dater ils sont toujours d’actualités :

  • c’était lors d’un stage de Tui Na avec le Docteur Sun Ada, responsable du service de Tui Na d’un hôpital de Shanghai, c’est un big boss dans son domaine avec beaucoup de bagages.
Docteur Sun Ada

Il m’a expliqué qu’il pratiquait le Qi Gong pour lui mais que le traitement du Qi Gong sur les patients « c’était n’importe quoi ! »(en chinois dans le texte). Tout en prononçant ses mots, il pose son pouce sur ma clavicule, j’ai alors senti une « grosse » vague d’énergie descendre jusqu’au pied… allez comprendre, c’est du « chinois » 🙂.

  • dans le même esprit, j’ai assisté à un colloque de Médecine Chinoise à Paris, une délégation officielle de médecins chinois était présente. J’ai attendu la fin des conférences pour leur poser cette question :

« le Qi Gong fait-il partie de la Médecine Chinoise »

et la réponse fut:

« Nous ne considérons pas le Qi Gong comme faisant partie de la Médecine Chinoise mais ça marche très bien ».

L’interprète chinois m’avait fait comprendre que j’avais bien fait de ne pas poser cette question pendant les conférences. Je ne suis pas sûr qu’aujourd’hui j’aurai posé la question pendant le temps consacré aux questions/réponses des conférences.

Là encore, la politique de vulgarisation du Qi Gong de Santé pourrait :

  • me permettre de poser mes questions en « live » sur le Qi Gong sans me dire que je vais mettre mal les médecins chinois.
  • rendre populaire le Qi Gong au sein de la profession médicale.
  • susciter un engouement vis-à-vis des étudiants en médecine (ou en sport 😛) afin de choisir cette filière.
  • permettre d’exaucer le souhait de Liu Tianjun de rendre « obligatoire » le Qi Gong pour les étudiants des facultés de médecine.

Le fait de rendre obligatoire une pratique comme le Qi Gong peut déranger. A l’école, avant de savoir si on aime un cours ou non, il faut l’essayer.

En cours, je n’aimais pas la mécanique quantique mais ça m’a permis de mieux comprendre des phénomènes naturels. C’est pareil pour le Qi Gong, il peut permettre de mieux comprendre la Médecine Chinoise. Même si c’est vrai, que de grandes pointures en pharmacopée et en acupuncture n’ont jamais pratiqué le Qi Gong.

J’espère simplement que si le Qi Gong, vu comme c’est parti on va dire le Qi Gong de Santé, devient obligatoire à l’Université, les « guérisseurs » en Qi Gong pourront continuer à exercer leur art sans être inquiétés.

Tant que ce n’est qu’une option et pas très populaires à l’hôpital, les autorités peuvent tolérées que les gens préfèrent aller voir des guérisseurs à l’extérieur de structures médicales.

Par contre, avec une réelle volonté politique de formation des praticiens en Qi Gong Médical, la Chine pourrait « décrédibiliser » ces guérisseurs qui pourraient avoir une vision différente de « leurs standards ».

Mais là on rentre dans les éventuels inconvénients, qui eux seront traités une prochaine fois 🙂!

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Bonne énergie !

Fatah

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